L’année dernière, pour mon anniversaire, Jean Queveau m’offrait délicatement le livre de Florence Arthaud. Elle y relate la nuit durant laquelle elle a failli mourir noyée et plus largement ses choix de vie.
Son goût pour la liberté et l’engagement avec lequel elle a poursuivi cette passion me fascinent. Des larmes coulent sur mes joues du reflet de cette vie si dense. De la capacité qu’ont certaines personnes de trouver un sens à leur vie et de s’y dédier à corps perdu. De la puissance du corps et de l’esprit humain à poursuivre ce qui les animent. Elle parle de sa lutte pour sa survie cette nuit là. Cela semble extrêmement bouleversant. En en même temps quand on lit le reste, cela donne l’impression que toute sa vie a été vécue comme ça : en mode survie ou plutôt au taquet. Survie dans le sens de l’économie du superflu, du dépassement de soi, du rassemblement de toute l’énergie disponible vers un projet plus grand que ce dont j’ai l’impression de me contenter.
 
Je lis et je pleure. Je fantasme sur une autre vie. Je culpabilise de ne pas m’être emportée moi aussi. De ne pas avoir obstinément recherché ce flot qui aurait pu emporter tout mon être dans un tel niveau d’accomplissement de soi. Et pourtant Florence Arthaud est morte. Et moi je suis là, sur une mer calme et paisible à lire son livre.
 
Et je repense à Achille qui a fait le choix d’une vie courte et pleine de gloire. Achille, le héros qui aux enfers regrette tant son choix. Je repense à ses paroles : « Illustre fils de Laërte,ne cherche point à me consoler du trépas ! J’aimerais mieux, simple cultivateur, servir sous, un homme pauvre qui ne posséderait qu’un faible bien, que de régner sur toutes ces ombres ! »
 
Je repense à mon petit garçon que je n’ai pas prénommé Achille par superstition. La peur reste là. Peut-être que c’est juste cela que je lui envie à Florence Arthaud, l’affranchissement. L’affranchissement des règles, l’affranchissement des peurs, l’affranchissement du lien.
 
A la suite de l’accident j’ai trouvé ça triste mais je n’ai pas été profondément choquée. J’ai écouté la nouvelle d’une oreille distraite. Quelque part mon jugement critique de notre société et de la télé-réalité ont éclipsé le drame de leurs vies perdues.
 
Maintenant je me dis que c’est un peu comme l’histoire de l’élastique qui fini par nous péter au nez. Reste à savoir si on en a vraiment vraiment bien profité.